Un
record ? C’est le moins qu’on puisse dire de cette aventure mystérieuse des
troupeaux de vaches dont le parcours de la RDC d’Est en Ouest qui séparent le
territoire d’Uvira et de Kenge en province du Kwango, à deux heures de voiture
de Kinshasa plonge la classe politique congolaise dans des conjectures les plus
fantaisistes. Des chevaux de Troie qui couvrent une attaque imminente de la
ville de Kinshasa, disent-ils.
Des légendes, on en raconte des centaines autour
de la vache dans la région des grands lacs. L’une d’elles est que jadis, des
vaches mythiques à longues cornes surgissaient des eaux du lac Kivu pendant la
nuit pour aller paître sur les collines surplombant la ville et en revenaient
au petit matin mais en y laissant les plus vieilles. D’où, l’appellation
Bukavu (Bukafu en langue Shi ou la ville
des vaches), nom donné au chef-lieu de la province de l’ex-Kivu voisine du
Rwanda, Burundi et Ouganda d’où proviennent, depuis la nuit des temps, des
vaches à longues cornes destinées à l’abattage au Congo.
Les vaches à longues cornes qui font le gros de
ces troupeaux en transhumance trouvées au Kwango dans l’ex-province de Bandundu.
C’est une race rependue en Afrique de l’Est chez les peuples nomades (Mbororo, Masai,
Karamojong) en Ouganda, Kenya et Tanzanie. Elles sont en phase d’élimination
des cheptels des pays de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) qui
ont opté, raisons économiques et de modernisme obligent, pour les vaches de races améliorées qui
alternent aisément élevage dans les pâturages et stabulation ; contrairement
aux vaches à longues cornes élevées en nomadisme sur les vastes étendues des
savanes dont la RDC dispose des meilleurs d’Afrique.
L’origine exacte de ces troupeaux accompagnés
par des veaux d’un et de deux mois apparemment en bonne santé qu’on voit aujourd’hui
au Kwango et se dirigent probablement vers des pâturages bien identifiés par
les éleveurs demeure un mystère, si l’on s’en tient à leurs déclarations. Ils
disent tantôt une chose tantôt une autres. Il suffirait de connaitre les
propriétaires des troupeaux et leur provenance, soit du Sud-Kivu ou du Katanga
à travers des étendues toutes aussi favorables à l’élevage, pour comprendre pourquoi
et comment ils sont passés par les mailles des services de sécurité publique et
des organisations locales très regardantes des droits de l’Homme. La découverte
supposée des accompagnateurs armées parmi lesquels un soldat des forces
spéciales de l’armée rwandaise qui auraient combattu aux côtés du M23, donnent
une dimension guerrière suspecte à cette aventure qui a bénéficié d’une
solidarité des populations locales.
Au Sud-Kivu, l’axe Kilembwe-Misisi et Salamabila au Maniema
voisin est le théâtre des confrontations permanentes entre
les éleveurs et habitants du territoire de Kabambare. En mi-janvier dernier, 50
vaches d’un troupeau de 130 qui se dirigeait vers Kindu, ont été égorgées et
distribués aux populations locales par 5 miliciens Mai-Mai sans riposte. Le
centre de Salamabila dans le territoire de Kabambare en particulier est aussi
un centre de commerce et d’exploitation minière. De part cette position
économique, Salamabila connait un afflux des commerçants amenant de vaches pour
la consommation des viandes. De Minembwe en passant par le Lulenge jusqu’à
Kilembwe, cette région est longtemps restée l’entité servant aux pâturages,
souvent pendant la période de transhumance. Ces éleveurs Banyamulenge ont,
durant cette décennie, foncés vers Salamabila centre et ses environs.
Faut-il
rappeler qu’en 2013, 1.654 vaches en provenance de la Tanzanie étaient
bloquées dans un site de la localité de
Kigongo, à 7 Km au sud de la cité d’Uvira (province du Sud-Kivu ; RDC).
Ces troupeaux appartiendraient à des éleveurs rwandais expulsés récemment de la
Tanzanie. Ces bêtes auraient
traversé la frontière Congolo-burundaise de Kiliba. Ce groupe de rwandais
chassés de la Tanzanie aurait l’intention d’aller en direction de la province
du Katanga. Pour atteindre le Katanga, les
vaches devaient passer par le territoire de Fizi d’où les populations Bembe se
plaignaient pour la destruction de leurs champs de maniocs par des vaches en
transhumance. Puis, silence radio !
Le
Rwanda n’a plus suffisamment d’espaces de terres pour accueillir ces vaches
mythiques que son gouvernement a également bannies de son cheptel pour des
raisons sus-évoquées. Dans le même registre, les pays de l’East Africa Economic
Community (Rwanda, Uganda, Tanzanie et Kenya) n’ont pas
encore mis en place un système d’exportation de la viande fraiche dont la RDC
est le plus grand demandeur dans la sous-région. Depuis un demi-siècle, les
vaches destinées à la boucherie arrivent sur leurs pattes jusque dans les
villages des consommateurs à l’intérieur du sous-continent congolais.
Cette transhumance qui vient toquer aux portes
de Kinshasa a lieu au moment où la cohabitation avec les éleveurs Peuhls
Mbororo de la République centrafricaine pose un sérieux problème du droit international à la défaveur des populations locales du Haut-Uélé. La RDC a-t-elle vocation de devenir la destination finale de ce
type d’élevage conflictogène que les autres pays d’Afrique sont en train
d’évacuer dans leurs cheptels ?
Restons dans l’angle économique pour dire que
chaque jour qui passe, près d’une
centaine de vaches destinées à l’abattoir, entrent par la porte de Ruzizi II, devant
les quatre services traditionnels à la douane (DGI, DGDA, OCC et Service de
quarantaine). Les unes sont dirigées vers l’abattoir central de Bukavu, ancien
terminal des Elevages et Abattoirs du Katanga (ELAKAT) et les autres vers
Mwenga, Kamituga, Shabunda, Kalima jusqu’à Kindu pour la consommation de la
viande. levy Pontien Bashonga
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